Pouvez-vous brièvement nous décrire votre parcours professionnel ?
_ Je suis psychologue de formation, je me situe dans une
approche psychanalytique. C’est par ce
biais que je rencontre les enfants et que je me propose de les aider. J’ai travaillé dans le cadre de la protection
de l’enfance, mais aussi à l’Ecole des Educateurs de Paris. Depuis 2006 j’œuvre sur les ITEP Commin et
Laborie ainsi que sur le SESSAD. Je me
suis formé au psychodrame à la Salpêtrière entre 2002 et 2006.
En quoi consiste le
psychodrame ? Que propose-t-il
spécifiquement dans le cadre analytique ?
_ Le psychodrame est pertinent pour répondre à des difficultés
de verbalisation. Nous y avons recours
lorsque dans le dispositif dit classique, c'est-à-dire en relation
individuelle, la parole de l’enfant reste bloquée, ne peut émerger. En proposant à un enfant de participer au
psychodrame de groupe ou individuel on fait le pari qu’il pourra exprimer
quelque chose qui est verrouillé, enfoui et reste défendu. Dans cette situation les co-thérapeutes
deviennent le support de la pensée de l’enfant, ils sont dans le prêt
psychique. Ils viennent mentaliser
quelque chose de son inconscient et se prêtent au jeu de ses associations. C’est moins dur pour l’enfant de s’exprimer
en s’appuyant sur le jeu des autres quand il est arrêté dans sa pensée, dans
son élaboration.
Combien dure en
général une prise en charge au sein du psychodrame ?
_ C’est un travail qui s’inscrit dans la durée. Cela prend à peu près deux années pour que
nous puissions en apprécier l’évolution.
A terme cela peut déboucher sur un suivi individuel où l’enfant est
alors à même de déposer une parole libérée et de cheminer par lui-même, sans
l’aide des co-thérapeutes.
Pouvez-vous nous
parler des deux types de psychodrames que vous animez ?
_ Pour répondre à une demande sans cesse réactualisée et
agir au plus prés des besoins des enfants nous proposons deux dispositifs bien
spécifiques. Le psychodrame individuel
et le psychodrame de groupe.
Le psychodrame individuel est pensé pour les enfants à
l’aise avec la parole, qui peuvent facilement s’exprimer, même si au fond leur
parole est défendue. Des enfants pour
qui ce n’est pas si évident de se mettre en scène et de jouer sous le regard
des autres. Dans ce dispositif il n’y a
qu’un enfant et quatre co-thérapeutes.
L’enfant propose une scène et attribue les rôles de chacun. Mon rôle est d’animer, c'est-à-dire
d’extraire de la scène ce qui s’y tramait et de le mettre dans une perspective
nouvelle, d’éclairer, de mettre en lumière.
Le psychodrame de groupe, quand à lui, concerne des enfants
qui ont des difficultés de verbalisation, mais une aptitude certaine à se
mettre en scène devant les autres. Les
enfants construisent ensemble la scène à jouer. C’est une co-construction entre pairs.
Chacun décide pour soi du rôle qu’il va tenir dans le jeu. Un seul adulte tient le rôle de co-thérapeute,
mais si un enfant à besoin d’être rassuré un adulte peut venir en support. Ce sont les enfants qui attribuent aux
adultes leurs rôles.
Et si vous deviez
illustrer vos propos par un tableau ?
_ Les joueurs de cartes de Toffoli. Parce que ce peintre met ses personnages dans
un jeu de couleurs qui se croisent et se segmentent autant au niveau du corps
que dans le fond de la scène où ils jouent et que leurs visages restent en
devenir dans nos yeux. Ce sont des
visages sans traits, mais où tout est encore à tracer.
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Toffoli / Les joueurs de cartes. |